Message des évêques catholiques à nos gouvernants, aux leaders des partis politiques et aux concitoyens
A nos Gouvernants,
Aux leaders des partis politiques,
A nos concitoyens
Au terme des travaux de la 117ème Assemblée plénière de notre Conférence, Nous,
Archevêques et Evêques de Côte d’Ivoire, très préoccupés par la situation socio-politique qui prévaut dans notre pays, vous adressons ce message, suite logique de nos deux derniers messages :
Le premier, « Evitons-nous une autre guerre » en juin 2019 et le 2è « pour des élections transparentes, justes et ouvertes en vue de la réconciliation et de la paix » en janvier 2020.
Certes, l’Eglise n’est pas du monde, mais elle est dans le monde.
A ce titre, rien de ce qui touche à la vie des hommes ne saurait lui être étranger. En effet, les joies et les peines, les espoirs et les angoisses des hommes sont aussi ceux de l’Eglise (cf GS N°1).
Forts de cela, nous venons une fois encore, nous adresser à vous, membres de la classe politique et chers concitoyens. Nous le savons, l’élection présidentielle du 31 octobre dernier, a engendré une crise d’une rare violence, faisant beaucoup de pertes en vies humaines, surtout parmi les jeunes et provoquant d’énormes dégâts matériels. Nous prions pour le repos de tous ceux et toutes celles qui ont perdu la vie dans cette tragédie.
Nous condamnons fermement ces atrocités et cette barbarie qui sont d’un autre âge et exprimons notre compassions aux victimes, à leurs familles, et à la Nation ivoirienne tout entière car dans cette catastrophe nationale, c’est d’abord la Côte d’ivoire qui est perdante. Toutefois, il ne faut pas céder au découragement. Le chemin qui mène à la paix est et sera toujours long et difficile. En effet, on finit de bâtir un édifice matériel, mais on n’a jamais fini de bâtir la paix. C’est pourquoi, une fois encore, nous vous adressons ce message pour vous encourager à continuer inlassablement à œuvrer pour la paix qui ne doit pas être considérée comme le simple silence des armes. La paix suppose une justice vraie et équitable dans la gestion des personnes et la juste redistribution des richesses du pays. Une paix en toute vérité et sincérité, sans compromission. C’est là, la voie pour l’avènement d’une Côte d’Ivoire nouvelle.
2 Cette Côte d’Ivoire est à notre portée. Sa construction requiert un engagement individuel et collectif. Un des fondements de cette nouvelle Côte d’Ivoire est la RECONCILIATION. Or qui dit réconciliation dit remettre ensemble au moins deux groupes séparées. Dans notre pays malheureusement, beaucoup de filles et fils sont séparés les uns des autres ou éloignés de la Mère patrie par la politique ; et le fossé a été profondément accentué par la dernière élection présidentielle.
Le moment est venu de redonner la joie à la Côte d’Ivoire de voir ses enfants réunis autour d’elle sans obstacles d’ordre politique, ethnique ou religieux. C’est le lieu d’appeler au retour de tous les exilés politiques et à la libération de tous les prisonniers politiques et d’opinion.
Pour l’avènement de cette nouvelle Côte d’Ivoire, nous notons la création du Ministère en charge de la réconciliation. Nous espérons de tout cœur que cette nouvelle structure ne sera pas une de trop ; mais au contraire, capitalisant les acquis de celles qui ont essayé d’œuvrer dans ce sens, notamment la Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation (CDVR) et la Commission Nationale pour la Réconciliation et l’Indemnisation des Victimes CONARIV, ce ministère ira sans entrave jusqu’au bout de sa mission, en réconciliant effectivement les Ivoiriens de tout bord.
En pensant aux élections à venir, nous invitons instamment une fois encore au respect scrupuleux des lois que nous nous sommes données et qui régissent notre Nation. Nous invitons à la recherche inlassable de la vérité dans les tractations politiques et au respect de la dignité de la personne et de la vie humaine.
Nous ne saurons terminer notre message sans encourager la classe politique à poursuivre l’effort de dialogue politique dans la sérénité et la vérité avec toutes les composantes de la Nation ivoirienne en vue de l’instauration d’un climat socio-politique détendu et apaisé.
Depuis cette Place symbolique dédiée au Saint-Esprit, en ce jour de la célébration des 125 ans de l’évangélisation de notre pays, nous implorons une nouvelle effusion de l’Esprit-Saint sur la terre ivoirienne pour la conversion des cœurs.
Que se lève sur la Côte d’Ivoire, notre Mère patrie, une ère nouvelle de réconciliation, de justice et de paix.
Fait à Grand-Bassam, le 24 janvier 2021
Les Archevêques et Evêques de Côte d’Ivoire