Guerre en Ukraine: réactions sur place et en Russie
[En direct] Le président russe Vladimir Poutine a annoncé jeudi à l’aube dans une déclaration à la télévision une opération militaire en Ukraine pour défendre les séparatistes de l’est du pays. De puissantes explosions ont retenti dans plusieurs villes. Les dernières réactions des religieux d’Ukraine ou en Russie.
Vatican News (mis à jour à 18h05, le 24 février 2022)
Message du Patriarche Cyrille: surmonter les divisions
«Que le Seigneur tout miséricordieux, par l’intercession de notre Très Pure Souveraine la Mère de Dieu et de tous les saints, garde les peuples russe, ukrainien et les autres, que réunit spirituellement notre Église !» Dans un message adressé aux fidèles russes orthodoxes de Russie ou d’Ukraine, le partriarche de Moscou et de toute la Russie exprime sa «profonde douleur de voir les souffrances des gens» provoquées par les événements en cours et, outre la compassion, exhorte «toutes les parties au conflit à faire tout ce qui est possible pour éviter les victimes parmi les civils». Il demande aux hiérarques, pasteurs, moines et moniales et aux laïcs de fournir «toute l’assistance possible à toutes les victimes, dont les réfugiés, les gens restés dans toits et moyens de subsistance». Le patriarche exhorte à élever une prière redoublée et ardente pour le prompt rétablissement de la paix, et se montre confiant: «les peuples russe et ukrainien ont une histoire commune séculaire, remontant au Baptême de la Rus’ par le saint prince égal-aux-apôtres Vladimir. Je crois que cette communauté donnée par Dieu aidera à surmonter les divisions et contradictions qui ont surgi et ont mené au présent conflit».
A Moscou, les réseaux sociaux pour savoir ce qui se passe en Ukraine
A Moscou, nous avons joint le curé de la paroisse catholique francophone de la capitale, Viachieslav Dorokof. Depuis l’église de Saint-Louis des Français, il nous raconte l’atmosphère qui régnait à Moscou aujourd’hui: «J’ai reçu un coup de fil de mon frère qui est médecin au sud de la Russie qui m’a dit que la guerre a commencé. À Moscou, actuellement, tout est calme, mais je pense quand même qu’il n’y a pas beaucoup de voitures. Il y a aussi très peu de monde dans le métro mais c’est calme. Bien sûr, c’est en boucle ici à la télévision mais, malheureusement, nous sommes habitués à la propagande donc on ne fait pas trop confiance à ce qui y est montré. On consulte surtout les réseaux sociaux. Beaucoup de Russes ont de la famille en Ukraine et la situation est très inquiétante.. On essaie d’avoir des informations en direct. C’est horrible, je pense que nous en tant que chrétiens on doit prier pour la paix. C’est la seule chose qui nous reste et appeler les politiciens de tous les bords s’assoir à la table des négociations et à mettre fin à cette folie meurtrière», confie le prêtre.
Réfugiés ukrainiens en Pologne
L’afflux de réfugiés ukrainiens a déjà commencé vers la Pologne. Varsovie a ouvert neuf premiers centres d’accueil à proximité des principaux postes-frontières. Les arrivants pourront y recevoir informations, repas, repos et aide médicale.
Mgr Jan Sobiło, évêque auxiliaire de Kharkiv, un Polonais, se trouvait dans l’est de l’Ukraine lorsque la guerre a éclaté jeudi matin, lance un vibrant appel au micro de la section polonaise de Radio Vatican: «Si des réfugiés d’Ukraine viennent en Pologne, accueillons-les chaleureusement! Même si quelqu’un a peu de place et que c’est difficile pour lui, mais si nous les recevons, Dieu nous récompensera, ainsi que les enfants et petits-enfants des familles qui les reçoivent. C’est déjà terrible aujourd’hui, et ça pourrait être encore plus terrible. Ces personnes sont très fatiguées, et elles aiment beaucoup la Pologne. Les Ukrainiens n’ont maintenant personne de plus proche d’eux. Je demande que la Pologne accueille chaleureusement ceux qui souhaitent se réfugier dans notre patrie, par nos églises. Pour que les personnes qui viennent dans nos paroisses se sentent chez elles. Je le demande à mes compatriotes dans ma patrie!»
“Les Ukrainiens n’ont maintenant personne de plus proche d’eux que les Polonais actuellement”
Caritas Ukraine
«Aujourd’hui, 24 février, à 5h00 du matin, les forces armées de la Fédération de Russie ont lancé un bombardement intense en lançant des attaques de missiles et de bombes sur les aérodromes de Boryspil, Ozerne, Kulbakino, Chuhuiv, Kramatorsk, Chornobaivka». Ce tweet, par lequel Caritas Ukraine a confirmé ce matin le début des opérations militaires dans le pays d’Europe de l’Est.
«Nous glissons vers l’abîme»
«Nous avons entendu les bombes tomber ici près du séminaire où il y a une caserne militaire», raconte à Vatican News le père Roman Ostrovskyy, vice-recteur du séminaire gréco-catholique de Kiev, qui souligne comment la situation s’est soudainement précipitée. «Une mauvaise surprise», admet-il, soulignant que la situation affecte l’ensemble du pays et pas seulement le Donbass. «Nous essayons de revenir à la normalité, explique-t-il, même si c’est difficile parce que nous sommes maintenant en guerre». Beaucoup fuient, mais que d’autres restent parce qu’ils ne veulent pas quitter l’Ukraine, rapporte le père Roman. Le chemin est celui de la prière face à la folie de la guerre, «les conflits peuvent être arrêtés avec la prière, avec la foi. Depuis huit ans, l’Ukraine vit cette tension, qui a explosé. Nous glissons dans l’abîme de la violence, mais la justice et la paix doivent gagner, nous ne pouvons pas vivre autrement».
Prières à genoux
«La première chose que nous avons faite a été de nous mettre à genoux et de prier Dieu de sauver l’Ukraine», a déclaré à Vatican News Taras Zheplinskyi, rédacteur en chef du service de communication de l’Église catholique grecque ukrainienne. La peur est grande, et beaucoup de gens à Kiev veulent quitter la capitale. Sa Béatitude Sviatoslav Shevchuk (Ndlr, archevêque majeur de Kiev-Halyč de l’Église greco-catholique d’Ukraine) a souligné aujourd’hui dans une lettre que l’Église reste proche des gens, poursuit le père Zheplinskyi. «Les églises restent ouvertes. Nous demandons à tous de prier pour l’Ukraine, comme l’a également demandé le Pape. Ce qui se passe en Ukraine est une attaque contre les valeurs de la démocratie et de la dignité humaine. Mais malgré la situation actuelle, nous ne nous sentons pas abandonnés.»
«Que le Seigneur de Paix soit avec nous tous !»
Dans un message publié ce jeudi, l’Administrateur apostolique de l’Éparchie ukrainienne gréco-catholique St Volodymyr le Grand de Paris, lance un appel pour que recevoir du soutien «par la prière et l’information, ainsi qu’une aide humanitaire» après l’offensive russe, et «alors que les Ukrainiens défendent leur dignité et luttent pour la liberté et la démocratie». Mgr Hlib Lonchyna dénonce «l’agression des terres ukrainiennes» menée après une campagne de «discrédit» conduite par Moscou à l’encontre de Kiev. «Depuis huit ans, l’Ukraine est victime de l’agression russe», ce qui a coûté la vie à des milliers de citoyens ukrainiens, plus d’un million et demi sont devenus réfugiés dans leur propre pays, rappelle l’administrateur.
Le chef de l’Église orthodoxe ukrainienne (Patriarcat de Moscou) appelle à cesser une guerre fratricide
Il appelle le président Poutine à «cesser immédiatement la guerre fratricide». Dans une déclaration, le Primat de l’Église orthodoxe ukrainienne, qui dépend du patriarcat de Moscou, rappelle que «les peuples ukrainien et russe sont sortis des fonts baptismaux du Dniepr» et que «la guerre entre ces peuples est la répétition du péché de Caïn, qui par jalousie tua son frère. Une telle guerre ne trouve sa justification ni devant Dieu, ni devant les hommes». Il exhorte ses concitoyens «en ce moment fatidique, à ne pas céder à la panique, à être courageux et à manifester de l’amour envers votre Patrie et entre vous». Il appelle ses fidèles à la prière pénitentielle et à mettre derrière eux les dissensions et malentendus du passé. Il remercie les militaire «qui montent la garde, protègent et défendent» les Ukrainiens. Il plaide néanmoins «à régler nos problèmes terrestres dans un dialogue mutuel et une compréhension mutuelle», avant de conclure en espérant que «Dieu nous pardonnera nos péchés et que la paix divine règnera sur notre terre et dans le monde entier».