À Marioupol, une lettre de la dernière chance envoyée au Pape
Le cardinal Michael Czerny s’est fait le porte-parole d’une lettre-appel signée par les «mères, épouses et enfants» des survivants de Marioupol, encore ensevelis dans la ville. Une aide du Pape pour l’évacuation des civils «serait un véritable acte de miséricorde», considèrent les Ukrainiens.
Alessandro De Carolis – Cité du Vatican
C’est un appel digne et désespéré qu’ont adressé des mères, épouses et enfants de Marioupol au Pape François, au lendemain de ce lundi de Pâques. Les auteurs de la lettre parvenue au Vatican par l’intermédiaire du cardinal Michael Czerny, et adressée au Saint-Père, «met en évidence» ce que ce dernier a répété depuis le début du conflit. Elle fait écho au message Urbi et Orbi énoncé le 17 avril, durant lequel François «a parlé clairement de l’irrationalité totale de la guerre», a indiqué le cardinal Czerny, préfet par intérim du Dicastère pour le développement humain intégral.
La missive a été rédigée par le journaliste Saken Aymurzaev, de la télévision d’État ukrainienne «UATV-channel». Deux pages, qui donnent un aperçu de l’agonie en cours de cette ville martyre du conflit ukrainien. Une ville, dit-on, «réduite en cendres» après les sous attaque incessantes de l’armée russe, et épicentre d’une catastrophe humanitaire sans précédent dans l’Europe du XXIe siècle.
Un millier de civils retranché dans l’usine d’Azovstal
«Saint-Père, il est encore possible d’aider les personnes qui souffrent», bien que le nombre de ceux qui ne le font pas «augmente chaque jour», écrivent les femmes de Marioupol à François. Les épouses et enfants de ceux qui résistent encore à Mariupol -dont une centaine de personnes en uniforme, principalement médecins et cuisiniers- alertent sur la présence de centaines de blessés civils et militaires, privés de tout soin en raison de l’épuisement des médicaments et des désinfectants, et qui «doivent être évacués du champ de bataille».
La lettre décrit notamment avec force la situation de l’usine d’Azovstal, un complexe métallurgique devenu l’ultime fortesse de la ville assiégée par l’armée russe. Environ mille civils s’y trouveraient toujours aux côtés de l’armée ukrainienne. «Au début des combats -informent les habitants de Marioupol- ces personnes pensaient que vivre avec les militaires leur donnerait non seulement la sécurité, mais également la possibilité de recevoir de la nourriture, de l’eau et des soins médicaux». Pour beaucoup de femmes et d’enfants, ce qui leur semblait être une forteresse leur apparaît aujourd’hui comme un «piège» inaccessible, vers lequel il est devenu impossible de «livrer de la nourriture et de l’eau potable».
Demande de couloirs humanitaires et cessez-le-feu
«Cette pétition désespérée, affirme le cardinal Czerny, est également adressée à tous ceux qui ont la possibilité d’aider à la mise en place de couloirs humanitaires ou d’un cessez-le-feu». Elle intervient à un moment où, aux côtés de la foi et de la joie de la Résurrection, nous devons savoir porter «la souffrance et l’agonie de nos frères et sœurs en Ukraine et aussi de tant d’autres endroits dans le monde où il y a cette terrible irrationalité de la guerre», a indiqué le cardinal Czerny.
«Les femmes, les enfants et les blessés ne méritent pas une telle mort aux yeux du monde». Ce sont «les martyrs d’aujourd’hui», conclut la lettre à François. «Son aide dans leur évacuation de Mariupol deviendra un acte vraiment paternel, l’aide d’un bon pasteur et un véritable acte de miséricorde».