Deux prêtres tués en haine de la foi en Albanie seront béatifiés
Au cours de l’audience accordée ce 20 juin au matin au cardinal Semeraro, préfet du dicastère pour les Causes des saints, le Pape a autorisé la promulgation des décrets concernant le martyre du père Luigi Palić, de l’Ordre des frères mineurs, et du père Gjon Gazulli, ainsi que ceux sur les vertus héroïques de trois religieux et d’une laïque appartenant à un institut séculier.
Tiziana Campisi – Cité du Vatican
Deux prêtres tués en haine de la foi en Albanie au siècle dernier et donc martyrs seront béatifiés: le père Louis Palić, de l’Ordre des frères mineurs, qui a été arrêté, battu, torturé puis assassiné en 1913 par des soldats monténégrins pour s’être opposé aux exactions perpétrées sur la population et à la campagne de conversions forcées à l’orthodoxie à laquelle les catholiques et les musulmans monténégrins ont été contraints, et le Père Gjon Gazulli, prêtre diocésain, condamné sur la base de fausses accusations et pendu en 1927 parce que ses activités étaient considérées par le gouvernement comme un obstacle à la réalisation du plan pour l’unité de la population, qu’il voulait, à des fins politiques, libérer de toute appartenance confessionnelle.
Au cours de l’audience accordée ce matin au cardinal Marcello Semeraro, préfet du dicastère pour les Causes des saints, le Pape François a autorisé la promulgation des décrets reconnaissant leur martyre et ceux concernant les vertus héroïques de quatre serviteurs de Dieu: Isaia Columbro, frère mineur ; Maria Costanza Zauli, fondatrice des Servantes adoratrices du Très saint Sacrement (Ancelle Adoratrici del Santissimo Sacramento) ; Ascensión Sacramento Sánchez Sánchez, de l’Institut séculier Cruzada Evangélica ; Vincenza Guilarte Alonso, religieuse de la Congrégation des Filles de Jésus. Elles sont aujourd’hui vénérables. Nous vous proposons un bref portraits de ces hommes et femmes.
Un religieux fidèle à sa mission
Louis Palić, est né à Janjevo, au Kosovo, le 20 février 1877. Il grandit dans un milieu très religieux, à tel point que deux de ses frères choisissent également de se consacrer à Dieu. Il demande à être admis dans l’Ordre des Frères Mineurs à Cortemaggiore, en Italie, et est ordonné prêtre en 1901. Envoyé pour exercer son ministère dans la mission albanaise, il est nommé en 1907 recteur du couvent franciscain de Gjakova et, en 1912, il devient collaborateur de la paroisse de Peje, un territoire qui, après la première guerre des Balkans, avait été occupé par les Monténégrins, alliés des Serbes, qui avaient lancé une politique très répressive à l’encontre de la population albanaise, contraignant catholiques et musulmans à des conversions forcées à l’orthodoxie. Le père Palić prend la défense des uns et des autres et les exhorte à rester fidèles à leurs croyances. Conscient des dangers qu’il encourt, il reste à son poste et continue d’exercer son ministère par fidélité à sa mission. Les autorités monténégrines ordonnent son arrestation le 4 mars 1913. Emmené en prison, le frère mineur est battu et torturé, et le 7 mars, avant même son procès, dépouillé de son habit religieux, les soldats le tuent.
Un prêtre courageux
Gjon Gazulli est originaire d’un petit village près de Shkodra, Dajç de Zadrima, en Albanie. Né le 26 mars 1893, il devient prêtre en 1919. Curé à Gjader, à Qelez di Puka et à Koman, il réussit partout à se faire aimer de la population en lui apportant aide et encouragement. Il crée une école paroissiale pour l’enseignement de la religion catholique, mais est tenu à l’œil par le gouvernement pour avoir prétendument entravé l’éducation commune des musulmans et des chrétiens. Détesté par les autorités politiques pour la forte influence qu’il exerçait sur la population locale et les autres curés au niveau moral et religieux, alors que de nombreux prêtres quittaient l’Albanie, soumis au régime instauré par le président de la République Ahmet Zogu, le père Gazulli resta parmi les siens. Arrêté le 28 décembre 1926 et soumis à un simulacre de procès, il fut condamné sur de fausses accusations et pendu sur la place de Shkodra le 5 mars 1927.
Sur les traces de Saint Padre Pio de Pietrelcina
Issu d’une famille d’agriculteurs et d’un milieu serein et très religieux, Isaia Columbro, né Nicola Antonio Maria le 11 février 1908 à Foglianise, en Italie. Entré dans l’Ordre des frères mineurs, il a été ordonné prêtre le 25 juillet 1931 et a exercé diverses fonctions. Il a connu personnellement saint Padre Pio de Pietrelcina et a suivi ses conseils et son exemple. Humble, il se distinguait par l’accueil qu’il réservait à ceux qui venaient chercher auprès de lui aide, rafraîchissement et réconfort spirituel et matériel. Des files de fidèles cherchent à le rencontrer, à lui parler, à lui demander des prières et des bénédictions. Estimé et apprécié pour sa pratique inlassable du sacrement de pénitence, il est particulièrement proche des habitants d’Irpinia touchés par le tremblement de terre dévastateur de 1980. Avec l’âge, des problèmes de santé sont apparus qui, s’étant aggravés, ne l’ont pas rendu autonome, même dans l’administration des sacrements. Il est décédé le 23 juillet 2004. Appelé le « frère de l’hospitalité », sa réputation de sainteté s’est répandue après sa mort. Le centre de toute sa journée était l’Eucharistie, dans laquelle il puisait la force d’affronter les difficultés quotidiennes et de se faire proche des autres. Il vivait avec passion l’esprit de pauvreté de saint François et faisait tout son possible pour les plus démunis.
Une vie passée dans la prière
C’est dans la ville de Faenza, en Italie, que naquit le 17 avril 1886 Maria Costanza Zauli, qui entra à l’âge de 19 ans dans la congrégation des « Ancelle del Sacro Cuore » de Bologne. Après avoir servi comme infirmière à l’hôpital militaire de Bologne pendant la Première Guerre mondiale, elle commenca en 1916 à souffrir. Ce fut le début d’une longue période d’infirmités fréquentes qui la conduisirent, à partir de 1923, à être alitée pendant de nombreuses années. C’est précisément au cours de cette période qu’elle mûrit son intention de fonder une nouvelle communauté religieuse contemplative, dédiée à l’adoration continue du Saint-Sacrement, dans le but de prier pour la conversion du monde, pour les vocations sacerdotales et religieuses et pour l’unité de l’Église. Après avoir obtenu les autorisations nécessaires, sœur Constance sort de son lit le 3 août 1933, jour de l’inauguration du premier monastère. La Congrégation des Adorateurs du Saint-Sacrement fut érigée canoniquement en 1935 et de nombreuses jeunes femmes la rejoignirent. Sœur Constance passa le reste de sa vie au couvent de Bologne, où elle mourut le 28 avril 1954.
Une femme aux côtés des femmes
Septième d’une famille de dix enfants, Ascensión Sacramento Sánchez Sánchez est née le 15 juin 1911 à Sonseca, en Espagne, dans une famille aisée et très religieuse. Sa vie change vers l’âge de dix-huit ans, après avoir lu la vie de sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, dont l’exemple l’incite à faire de son mieux pour mener des actions d’évangélisation, notamment en s’engageant dans l’Action catholique. Elle rencontre ensuite, à Santander, le père Doroteo Hernández Vera qui, face à la propagation de la haine religieuse, fonde le 8 décembre 1937 une Œuvre religieuse appelée Cruzada evangelica. Ascensión rejoint le prêtre dans l’apostolat mené dans les prisons, continuant à diffuser le charisme de la «Croisade évangélique». Plus tard, on lui demande de collaborer à la gestion d’une maison à Madrid qui accueillerait pendant un an des femmes libérées de prison et dans le besoin. Elle en devient donc la directrice et accueille des centaines de femmes de différents milieux sociaux, culturels et politiques. En 1946, Ascensión tombe malade de la fièvre typhoïde et, après avoir prononcé ses vœux perpétuels, elle meurt à Madrid le 18 août à l’âge de 35 ans. L’héroïcité de ses vertus est reconnue dans cet «apostolat du pardon» pratiqué notamment dans l’accueil et le service généreux des femmes dans le besoin, dans la direction prudente, sage et avisée de l’œuvre qui lui était confiée, et dans l’endurance avec une patience chrétienne de la maladie qui l’a conduite à la mort.
La «santinha del colégio» de la Leopoldina
Elle aussi Espagnoles, Vincenza Guilarte Alonso est née le 21 janvier 1879 à Rojas de Bureba. Elle entre au couvent des Filles de Jésus de Burgos, une congrégation récemment fondée à Salamanque par Candida Maria de Jesus, et qui se consacrait principalement à l’éducation de la jeunesse. Ayant fait sa profession religieuse en 1909, elle est ensuite envoyée, avec cinq sœurs, au Brésil pour y fonder une communauté. Destinée à s’installer à Pirenopolis, lieu inconfortable à l’intérieur de la forêt, elle est bien accueillie par la communauté locale à laquelle elle se dévoue avec amour, enseignant à l’école publique. En 1927, elle partit pour Leopoldina, dans l’état de Minas Gerais, où, bien qu’elle ait rempli le rôle de vice-prieure, on lui confia la tâche de portière et de sacristine, qu’elle accepta avec humilité, sans protester ni exprimer de regrets, ce qui surprit beaucoup de sœurs. C’est ainsi qu’elle passa le reste de sa vie jusqu’à sa mort, le 6 juillet 1960, à la suite d’une chute qui lui brisa le fémur. Déjà de son vivant, certains fidèles attribuaient à ses prières la solution de tant de leurs problèmes, et à l’annonce de sa mort, il y eut une grande vague de condoléances dans toute la ville de Leopoldina pour celle qui était considérée comme la «santinha del colégio».