Le Pape au Conseil des sages musulmans: prière et fraternité sont nos devoirs
Pour son troisième discours au Bahreïn, le Pape s’est exprimé devant les membres du Conseil des sages musulmans, vendredi 4 novembre, à la mosquée du palais Sakhir d’Awali. Devant ce parterre de dignitaires sunnites, le Successeur de Pierre a réitéré «le devoir» des responsables religieux en matière de fraternité, «dans une humanité de plus en plus blessée».
«As-salamu alaikum!» Devant les membres du Conseil des sages musulmans, organisation basée à Abou Dhabi et fondée en 2014 pour «promouvoir la paix dans les communautés islamiques», le Pape François a répété combien «le Dieu de la paix ne conduit jamais à la guerre, n’incite jamais à la haine, ne favorise jamais la violence», exhortant à promouvoir la paix usant d’instruments comme la rencontre, les négociations patientes et le dialogue.
«Je viens à vous comme un croyant en Dieu, comme un frère et un pèlerin de paix. Je viens à vous pour marcher ensemble, dans l’esprit de saint François d’Assise, qui avait l’habitude de dire: »La paix que vous annoncez avec vos bouches, ayez-la plus abondamment encore dans vos cœurs » (Légende des Trois Compagnons)», a déclaré François, se disant frappé de voir comment, sur ces terres, il est de coutume, lorsqu’on accueille un invité, non seulement de lui serrer la main, mais aussi de se porter la main au cœur en signe d’affection. «Comme pour dire: ta personne ne reste pas éloignée de moi, mais elle entre dans mon cœur, dans ma vie», a relevé l’évêque de Rome.
Ne pas rester étrangers l’un pour l’autre
François estime ainsi qu’il y a de plus en plus besoin à se rencontrer, se connaître et prendre à cœur «de faire passer la réalité avant les idées, et les personnes avant les opinions, l’ouverture au Ciel avant les distances sur la Terre». D’autre part, «comment les fidèles de différentes religions et cultures pourront-ils coexister, s’accueillir et s’estimer mutuellement si nous restons étrangers les uns aux autres?», a-t-il interrogé, citant ensuite l’imam Ali: «Les personnes sont de deux sortes: ou bien ce sont tes frères dans la foi, ou bien ce sont tes semblables en humanité».
Ce sont des tâches qui nous incombent, responsables religieux, a-t-il relevé, sous le regard d’une humanité de plus en plus blessée et déchirée.
«Ces jours-ci, j’ai parlé de la force de la vie, qui résiste dans les déserts les plus arides en puisant l’eau de la rencontre et de la coexistence pacifique. Hier, je l’ai fait en m’inspirant du surprenant « arbre de vie » que l’on trouve ici à Bahreïn», a-t-il poursuivi, regrettant l’éloignement de l’homme du Créateur et de son ordre établi. «C’est de là que proviennent problèmes et des déséquilibres qui se succèdent dans le récit biblique : querelles et meurtres entre frères (cf. Gn 4), désordres et dévastations de l’environnement (cf. Gn 6-9), orgueil et contrastes dans la société humaine (cf. Gn 11)…» Tout ce mal s’enracine dans le rejet de Dieu et du frère, a estimé le Pape, pointant deux questions à ne jamais perdre de vue «Où es-tu donc?» et «Où est ton frère?».
Abraham, père dans la foi des nations
Le Pape d’interpeller les sages musulmans «frères en Abraham, croyants au Dieu unique» sur les maux sociaux et internationaux, économiques et personnels, ainsi que la crise environnementale de l’époque. «Nous avons un devoir unique et impératif, celui d’aider à redécouvrir ces sources de vie oubliées, de ramener l’humanité à s’abreuver de cette sagesse antique, de ramener les fidèles à l’adoration du Dieu du ciel et aux hommes pour lesquels il a fait la terre», a-t-il noté, proposant deux moyens: la prière et la fraternité. «Des armes humbles et efficaces».
Face à des scénarios tragiques, alors que le monde poursuit les chimères de la force, du pouvoir et de l’argent, le Pape a rappelé aux sages que seules la transcendance et la fraternité sauvent. «À nous de témoigner, plus par des actes que par des paroles, que nous y croyons. Nous avons une grande responsabilité devant Dieu et devant les hommes, et nous devons être des modèles exemplaires de ce que nous prêchons, non seulement à nos communautés et chez nous –cela ne suffit plus–, mais au monde unifié et globalisé».
Le Souverain pontife a conclu en rappelant la filiation abrahamique: «Nous ne pouvons pas seulement avoir à cœur « les nôtres » mais, toujours plus unis, nous devons nous adresser à toute la communauté humaine qui habite la Terre».