Le Pape plaide pour l’annulation ou la réduction de la dette des pays du Sud
«Après une mondialisation mal maîtrisée, après les pandémies et les guerres, nous sommes aujourd’hui confrontés à une crise de la dette qui touche principalement les pays du Sud, générant misère et détresse», a regretté le Pape lors d’une audience accordée aux participants d’une rencontre promue par l’Académie pontificale des Sciences qui portait sur la «Crise de la dette dans le Sud». François appelle à «créer un mécanisme basé sur la solidarité et l’harmonie entre les peuples».
Jacques Ngol, SJ – Cité du Vatican
Le Pape François a reçu dans la matinée de mercredi 5 juin 2024 les participants à la réunion organisée autour de «Crise de la dette dans le Sud», accompagnés du cardinal Turkson, chancelier de l’Académie pontificale des Sciences.
Réfléchir à des politiques contribuant à résoudre le problème des dettes
Dans son discours, le Saint-Père rappelle d’abord le but de cette rencontre qui vise à «entamer un dialogue sur la mise en œuvre de politiques qui contribueront à résoudre le problème de la dette qui affecte de nombreux pays du Sud», source de la souffrance de «millions de familles et de personnes dans le monde». Pour François, «les gens n’ont pas besoin de n’importe quel financement, mais seulement de celui qui implique une responsabilité partagée entre ceux qui le reçoivent et ceux qui l’accordent». Car le bénéfice qu’une société peut en tirer «dépend de ses conditions, de son utilisation et des domaines dans lesquels les crises de la dette peuvent être résolues».
Le Pape François dénonce, entre autres, l’échec d’une «mondialisation mal maîtrisée, après les pandémies et les guerres», accompagnée encore d’une «crise de la dette qui touche principalement les pays du Sud, générant misère et détresse, et privant des millions de personnes de la possibilité d’un avenir décent», alors qu’aucun «gouvernement ne peut moralement exiger de son peuple, qu’il subisse des privations incompatibles avec la dignité humaine».
Appel à la solidarité et à l’harmonie entre les peuples
Poursuivant, le Souverain pontife invite à rompre avec le cycle « financement-dette », en créant «un mécanisme multinational basé sur la solidarité et l’harmonie entre les peuples», qui tienne compte de «l’importance mondiale du problème et de ses implications économiques, financières et sociales». Pour lui, l’absence d’un tel mécanisme favorise le «chacun pour soi, où ce sont toujours les plus faibles qui sont perdants». Le Saint-Père rappelle l’importance d’un principe fondé sur «la justice et l’égalité qui ouvrent la voie aux solutions», en travaillant «de bonne foi et avec vérité, en suivant un code de conduite international, avec des normes de valeur éthique, qui protègent les négociations».
Le Jubilé propice à l’annulation des dettes des pays pauvres
«Au cours de l’année jubilaire 2000, saint Jean-Paul II a observé que le sujet de la dette extérieure n’est pas seulement de nature économique, mais qu’il implique des principes éthiques fondamentaux et doit trouver sa place dans le droit international»» fait savoir le Pape François, ajoutant que «le Jubilé peut être une occasion favorable pour des gestes de bonne volonté […], [pour effacer] les dettes ou au moins les réduire […] au service du bien commun». Rappelant que l’année jubilaire est une tradition juive qui au cours de laquelle «les dettes sont remises» François fait l’écho de «cet appel prophétique, aujourd’hui plus urgent que jamais, en gardant à l’esprit que la dette écologique et la dette extérieure sont les deux faces d’une même médaille qui hypothèque l’avenir». Dans cette perspective, il souhaite que «l’Année Sainte 2025 vers laquelle nous nous dirigeons soit un appel qui ouvre nos esprits et nos cœurs pour pouvoir dénouer ces nœuds qui étranglent le présent, sans oublier que nous ne sommes que des gardiens et des intendants, et non des maîtres».
Agir ensemble dans la construction d’un monde fraternel
L’évêque de Rome invite à «rêver et à agir ensemble dans la construction responsable de notre maison commune». Car «personne ne peut l’habiter avec une conscience claire s’il sait qu’autour de lui il y a une multitude de frères et de sœurs qui ont faim et qui sont également plongés dans l’exclusion sociale et la vulnérabilité». Permettre, cela, conclut le Pape, «est un péché humain, même si l’on n’a pas la foi, c’est un péché social».