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Le père Stoia inaugure son ministère comme curé de la basilique Saint-Pierre

Dans une interview accordée à Vatican News, le prêtre et frère mineur conventuel de 54 ans souligne le style d’Église synodale et ouverte avec lequel il entend poursuivre son engagement en tant que curé de paroisse, dans la basilique vaticane. L’accueil et la familiarité sont très importants, soutient-il. «Dans l’église des Saints Apôtres à Rome, d’où je viens, j’ai vu les « princes » et les pauvres assis sur les mêmes bancs: une vraie joie».
Antonella Palermo – Cité du Vatican

Avec la messe célébrée dimanche après-midi 10 octobre par le cardinal Mauro Gambetti, archiprêtre de la basilique Saint-Pierre, a été inauguré le ministère pastoral du frère Agnello Stoia, frère mineur conventuel, comme curé de Saint-Pierre.

Né à Pagani, dans la province de Salerne, il y a 54 ans, frère Agnello a mûri sa vocation à l’ombre du monastère franciscain de Saint Antoine à Nocera Inferiore. Il a passé les huit dernières années comme curé de la paroisse des Santi XII Apostoli, dans le centre historique de la capitale italienne. Entretien avec fra Agnello Stoia.

Comment vous sentez-vous à l’idée d’entreprendre cette charge?

Mon premier sentiment est celui de la gratitude, au Saint-Père, à mon frère Frère Mauro. Je suis très enthousiaste. D’une certaine manière, je sens de nombreux visages derrière moi, je me sens appartenir à un peuple de prêtres, j’ai l’impression de les représenter.

Avec quel bagage de vie spirituelle et de rencontres précieuses, mûri en particulier dans votre expérience précédente aux Saints Douze Apôtres à Rome, vous préparez-vous à vivre cette nouvelle mission?

Tout d’abord, la dévotion aux apôtres, à Philippe et Jacques, maintenant à Pierre, Simon et Jude. Le don de la prière aux apôtres pour tant de situations qui se sont dénouées. Je porte en moi l’enseignement de l’apôtre Jacques sur l’accueil des pauvres comme des riches. La joie que j’ai eue dans cette paroisse de voir des «princes» assis sur les mêmes bancs -car la paroisse des Saints Apôtres est entourée de maisons princières- et des pauvres. Se regarder avec beaucoup de respect, avec beaucoup de courtoisie: c’est une belle chose pour laquelle je remercie Dieu. En même temps, je porte en moi toute la dimension du rapport avec les Églises d’Orient, le voyage à Izmir, par exemple, l’expérience avec ma communauté franciscaine….. Et aussi l’expérience avec les personnes qui ont trouvé refuge pendant neuf mois sous les portiques de l’église (des dizaines de personnes, adultes et enfants, déplacées en 2017 suite à l’expulsion d’un bâtiment occupé dans le quartier romain de Cinecittà, ndlr). Je pense donc surtout à la belle expérience de l’Église de Rome, étant donné que pendant sept ans j’ai fait partie du Conseil presbytéral.

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On peut se demander si la figure du curé à Saint-Pierre est une nouveauté…

En fait, plus d’une personne m’a posé cette question. Le curé existe, bien sûr, depuis le début du XVIe siècle, lorsque la nouvelle fabrique de Saint-Pierre a commencé. Le curé a été ordonné pour ceux qui souhaitaient, dans ce «sanctuaire des nations», recevoir avant tout le baptême. Jusqu’à il y a trente ans, en substance, chaque famille romaine avait au moins un enfant baptisé à Saint-Pierre. Ensuite, le fait que le centre de Rome se soit dépeuplé a entraîné le déplacement des gens vers les banlieues.

Comment le curé interagit-il avec l’archiprêtre de la basilique?

Je suis son collaborateur direct. J’en suis heureux, en ce moment de réforme voulue par François dans toute l’Église et dans la Curie romaine. La réforme a besoin des esprits, dans mon cas du soutien des bras. Je serai donc proche de lui dans ce travail. Tout comme je me sens proche de toutes ces réalités qui travaillent à l’intérieur de la basilique, notamment pour l’accueil des pèlerins, des fidèles: les sanpietrini, les vigiles, l’association des Saints Pierre et Paul…. Il y a vraiment un monde à l’intérieur, responsable de l’entretien de la basilique et de l’accueil des personnes pour qu’elles se sentent en sécurité, guidées et aient des points de repère.

À cet égard, je repense à un livre que vous avez édité -présenté en juin dernier aux prêtres romains- qui incarne l’exhortation du Pape à être une Église en sortie. Mais comment le faire en pratique, pris dans les engagements plus « bureautiques » qui risquent souvent de prévaloir? Quels sont les enseignements rassemblés dans le livre que vous trouvez les plus utiles?

Je voudrais souligner deux choses: la première est que dans le centre historique de Rome, sortir signifie entrer. J’en ai fait l’expérience moi-même. Je me suis sentie comme l’Église qui sort avec la communauté que j’ai accueillie, dans la mesure où j’ai pu accueillir. Parce qu’il y a beaucoup de réalités périphériques qui viennent au centre et quand vous ouvrez la porte et présentez les coffres à trésors de la spiritualité, de la beauté, de l’art et de l’histoire et que vous les accueillez vraiment, alors vous avez une expérience vraiment incroyable. Je voudrais donc vivre le fait d’être curé à Saint-Pierre en sortant, c’est-à-dire en accueillant les gens.

L’autre note est celle de la synodalité, une voie que nous avons abordée au Conseil presbytéral depuis quelques années. L’Esprit a soufflé fort, nous nous sommes retrouvés en pleine mer. Et nous comprenons que l’Esprit est un, car nous avons commencé ce voyage il y a quelque temps et maintenant le Pape François le réalise avec une telle force. En outre, il a déclaré à l’occasion du 50e anniversaire du Synode des évêques que la synodalité est le défi de l’Église du troisième millénaire. La synodalité, c’est trouver les mots, les formes, les corps, se réinventer, avoir de la créativité pour faire en sorte que nous marchions ensemble. Je faisais partie du Vicariat de Rome, maintenant je fais partie du Vicariat du Vatican. En soi, ce sont deux structures du même diocèse, mais dans la pratique, elles marchent indépendamment. La première étape a été de demander aux cardinaux Gambetti et De Donatis de participer au Conseil des préfets, qui est le conseil opérationnel du point de vue pastoral au sein de l’Église de Rome. C’est donc bien que maintenant le curé de saint-Pierre soit là aussi. C’est aussi une façon d’exprimer la synodalité: regarder vers l’extérieur, construire un pont pour que, comme nous l’a dit le Pape François, nous ne le fassions pas mal paraître! «Si la voie de la synodalité n’est pas suivie dans mon église, vous me faites mal paraître», a-t-il déclaré avec humour le 18 septembre, alors qu’il réunissait plusieurs fidèles dans la Sala Nervi…

En effet, le début de votre mission dans cette basilique coïncide avec le début du parcours synodal. Comment voyez-vous cette combinaison?

Je vois tout cela comme un évènement providentiel. Je m’inspirerai des paroles et des gestes du Pape, puisque je suis le curé de sa basilique. J’espère être à la hauteur, être capable de traduire les pensées et les actions du Pape François de la manière la plus vivante et immédiate.

Quelle valeur ajoutée la spiritualité franciscaine dont vous portez l’habit peut-elle donner à votre ministère?
Une fois de plus, je me réfère au Pape François, parce qu’il a fait de l’enseignement de François d’Assise le principe directeur de son ministère pétrinien, lorsqu’il a parlé de l’évangélisation en termes de sortie, de rencontre avec les gens, de dépassement de l’idéologie du discernement… Et puis dans Laudato si’, dans Fratelli tutti où l’enseignement de François d’Assise devient l’enseignement de Pierre… Ici, j’ose dire que je me sens vraiment chez moi. J’ajouterai que -beaucoup l’ignorent- la paroisse des Saints Apôtres a été la paroisse de Michel-Ange pendant cinquante ans. Passer sous le dôme est un grand saut, mais nous étions en quelque sorte habitués à cela…

Nous entendons souvent parler du défi de ramener les gens, en particulier les jeunes, dans les églises. Quel peut être, à votre avis, le chemin à cultiver pour revigorer la fréquentation des églises comme espaces de guérison de la relation face à face avec le Seigneur?

Je crois que la voie à suivre est toujours de rester proche, de «perdre du temps» avec les gens. J’ai perdu beaucoup de temps. Avant de venir ici, j’ai passé vingt ans à Irpinia, dans un couvent abandonné et isolé à Montella. Il n’y avait personne, mais il a suffi d’accueillir un groupe de jeunes qui ont transmis leur voix et c’est devenu un peuple.

Nous sommes restés ensemble, nous avons prié ensemble, nous avons travaillé ensemble, nous avons mangé des quintaux de poussière pour nettoyer, pour mettre de l’ordre. Mais ils se sont prêtés au jeu. L’aspect de la familiarité est très important pour moi et il a beaucoup marqué ma vie. Ce n’est pas une recette, mais je vois que le Pape insiste sur ce point et je suis convaincu que c’est la voie.

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